Je la vois, je la sens, je la hume.
Chatte de gouttière, du bout des pattes, voluptueusement, j'en fais le tour, mon regard la caresse,
mes cils l'étreignent.
J'ouvre grand ma poitrine et l'y reçois toute entière, tel le harpon dans la chair des baleines.
Elle reste plantée, surprise de s'y retrouver intacte comme la toute première fois.
Dans mes bras, je la berce, la caresse du bout des pieds et la fais mienne.

Île de l'instant, du rêve inachevé, abandonnée puis reconquise, recueille mon corps
au creux de tes rochers, emplit mes poumons de ta poussière chaude et dorée,
laisse sonner mes talons sur tes pavés disjoints.
Je te survole Ile, je suis Elle.
Terre de mer, amère et douce, alourdie du cri des hommes
qui t'ont aimée, tu pars à la dérive, immobile en rêvant.
Île guerrière, verrouillée, détournée, remodelée par tes fidèles, tu deviens Ile magnétique, chargée d'amour,
tu m'attires, comme la lampe de nuit la phalène.
Grands espaces pour mes petits creux, tu emplis mon coeur,
soigne mes blessures au rythme de tes marées.
En toi, je me refais l'enfance heureuse, jamais connue, toujours rêvée.
J'entends tes cris, tes rires s'envoler sur la mer puis revenir
façonner mon corps recréé à la seconde
sonorités fraîches et cristallines de tes petits matins.
Tu m'inspires.
Je te respire au tempo de ta vie jaillissante.
Je viens à toi en état d'urgence, quand le monde bat comme un tambour, explose ma tête et l'éparpille.
Mon île , je te dépose dans un écrin et je t'emmène comme le regard de l'homme que j'aime.
Commentaire écrit par M. Jean Cochard, maire de l'Ile d'Aix pendant 16ans homme au grand cœur et poète.
